Education & Formation

N° e-293

Pour accéder au menu de toutes les publications e-293, cliquez ici.

NOUVELLES

La Revue Education & Formation est sur Facebook :

Le numéro ISSN de la Revue Education & Formation est le : ISSN 2032-8184.

Le numéro « e-294 » traitera de la problématique de « La formation des enseignants » suite à la journée d'étude ABC-EDUC en septembre 2009. Il paraîtra dans le courant septembre - octobre 2010.

Changement : Le numéro « e-295 » sera consacré à la thématique « Inégalités scolaires et processus de relégation». Si vous souhaitez y contribuer, merci de transmettre vos articles au plus tard pour le 25 septembre 2010 (voir Appel à soumission). Il paraîtra en décembre 2010.

Le numéro « e-296 » sera consacré à la thématique « Développer et évaluer des compétences dans l'enseignement supérieur : réflexions et pratiques » Si vous souhaitez y contribuer, merci de transmettre vos articles au plus tard pour le 15 octobre 2010 (voir Appel à soumission). Il paraîtra en février-mars 2011.

Le numéro « e-297 » sera consacré à la thématique « Ecole-Famille ». Si vous souhaitez y contribuer, merci de transmettre vos articles au plus tard pour le 31 décembre 2010 (voir Appel à soumission). Il paraîtra en juin 2011.

Un numéro ultérieur sera consacré au thème « La professionnalisation des enseignants en formation initiale » et reprendra partiellement des contributions de l'AREF 2010. Plus d'information à ce sujet vous parviendront. Publication envisagée à l'automne 2011.

Rédacteur en chef
Bruno De Lièvre
Université de Mons
revue_redac@umons.ac.be


ARCHIVES

Collaborations pour la pratique et la recherche en éducation

Bruno De Lièvre* — Liliane Dionne** — Christine Couture***
Université de Mons* – Université d'Ottawa** – Université du Québec à Chicoutimi***

Pierre Lévy (1994) dans son ouvrage « L'intelligence collective » met en évidence la complémentarité indispensable des idées qui mène à une connaissance enrichie au fil du temps, au fil des rencontres, au fil des échanges. La famille, l'école, les médias sont autant d'espaces d'interactions au sein desquels les êtres humains s'enrichissent mutuellement. De manière évidente, il existerait une limite à ce que les enseignants et les chercheurs peuvent apprendre seuls, « chaque humain ayant besoin d'autrui pour apprendre et s'épanouir » (Fullan, 1993, p.17). Dans les écoles, les recherches sur les enseignants démontrent de plus en plus les retombées positives de la collaboration entre collègues, de la solidarité, des partenariats avec la collectivité pour le plus grand bénéfice des élèves. Lortie (1964), dans son étude approfondie de la fonction enseignante, met en évidence une grande solitude chez les praticiens de l'enseignement. Il semble que cet isolement chez l'enseignant soit en voie de changer. Nombre d'occasions lui sont maintenant fournies pour qu'il partage son vécu et ses expériences avec ses collègues et les autres personnes-ressources du milieu éducatif. Cela exige bien entendu de s'ouvrir, d'exposer ses pratiques, de faire des concessions, de tenir compte des points de vue de l'autre, de discuter des situations qui l'occupent ou le préoccupent. Reste que l'objectif est constructif, que le but est de mieux « faire » ensemble, que chacun trouve une place qui lui convienne dans la meilleure harmonie possible avec les autres, tout en mettant en avant l'objectif commun qui est la réussite de tous les élèves. Les développements de la recherche aussi nous indiquent que les scientifiques partagent cette intention. L'intelligence collective que développent les chercheurs via des procédures d'évaluation par les pairs, les références aux publications des collègues, l'échange de données ou le partage d'expériences n'empêche pas nécessairement l'erreur ou l'absence de qualité mais cette démarche est nettement préférable « pour le progrès des connaissances, aux arguments d'autorité ou aux institutions hiérarchiques, dogmatiques et opaques dotés de pouvoirs inquisitoriaux » (Lévy, 2010, p.2) Toutefois, il arrive, comme dans toutes les histoires humaines, que les finalités ne soient pas identiques pour l'ensemble des acteurs. Des dérives peuvent survenir : les a priori, les préoccupations individuelles prennent parfois le pas sur le bien-être de la communauté éducative. Quand cela arrive, il est essentiel de mettre en avant la nécessité du dialogue compréhensif avec l'autre, condition indispensable qui permette de poursuivre un chemin en commun. Le travail en collaboration a un coût, celui de songer en permanence à la manière dont on peut travailler ensemble pour le meilleur bénéfice de chacun. Il faut reconnaître aux groupements humains et sociaux dans lesquels nous travaillons et nous vivons le pouvoir qu'ils ont de contribuer à améliorer le quotidien de chacun non pas en gommant les particularités ou en réduisant les initiatives mais bien en stimulant la créativité, l'originalité et l'esprit d'entreprise par l'articulation et la coordination des compétences que chaque individu possède et qu'il doit avoir l'occasion de mettre en oeuvre pour le bien commun.

En termes d'apprentissage, toutes ces questions se posent : comment apprendre les uns des autres ? Comment partager les expériences qui nous enrichissent mutuellement ? Comment augmenter notre capital de connaissances grâce à l'apport d'autres idées que les nôtres ? Le socio-constructivisme, le travail collaboratif, les communautés d'apprentissage font partie des déclinaisons pédagogiques de ce « vivre-ensemble » qui débouchent toujours sur une croissance de notre connaissance mutuelle des autres, de ce qu'ils savent, de ce qu'ils font, de ce qu'ils sont… Nous sommes persuadés que plus augmente notre compréhension du monde extérieur, plus la tolérance a des chances de devenir une valeur qui guide les pas de chacun dans ce monde. Les enseignants, les apprenants, les individus en général, tous, nous avons besoin d'un climat propice à l'apprentissage qui passe par une capacité à travailler ensemble pour un enrichissement mutuel. C'est à cette capacité à oeuvrer pour le bien commun dans le cadre de nos systèmes éducatifs que contribue ce numéro e-293 d'Education & Formation.


Ce numéro e-293, consacré « aux communautés d'apprentissage », est issu du travail d'équipe réalisé dans un symposium du Réseau francophone de recherche en éducation et formation (REF), qui s'est tenu à l'Université de Nantes en juin 2009. Treize articles y ont été présentés, commentés, révisés et finalement retenus pour parution dans ce présent numéro. C'est grâce au travail de collaboration de chacun des auteurs, mais particulièrement de celui d'un comité scientifique formé de Liliane Dionne, Christine Couture, Amaury Daele, Bernadette Charlier, Jean-Yves Bodergat, Éric Roditi et Louis de Vos que nous avons pu parfaire le travail débuté à Nantes, et en arriver à la qualité d'articles que nous présente ce numéro thématique. Un quatorzième article (hors REF) s'ajoute à la collection et enrichit judicieusement l'ouvrage. Ce numéro se divise donc en quatre parties qui abordent des thèmes plus spécifiques entourant le travail en communautés :

  • Partie 1 : l'accompagnement des communautés d'apprentissage (Savoie-Zajc ; Bednarz & Proulx)
  • Partie 2 : les processus entourant le travail de collaboration dans les communautés d'apprentissage (Tavignot & Buhot ; Schneeberger)
  • Partie 3 : les communautés d'apprentissage virtuelles (Daele ; Sylla & De Vos ; Laferrière & Allaire)
  • Partie 4 : le développement professionnel par les communautés d'apprentissage (Pilonel, Luisoni & Rouiller ; Charlier ; Dionne & Couture ; Bailleul, Themines & Bodergat ; Defrance ; Roditi ; Wittorsky & Briquet-Duhazé).

Pour accéder au menu des publications e-293, cliquez ici.

Nous vivons dans un contexte où la formation des enseignants prend toute son importance dans la société du savoir. Ces acteurs représenteraient, semble-t-il, une des clés du changement en éducation, bien que ce changement prenne du temps et des ressources. Il appert que la collaboration entre collègues figurerait parmi les éléments essentiels pour parvenir à une qualité d'enseignement et d'apprentissage dans les écoles (Little, 1990). En ce sens, les recherches identifient les dispositifs collaboratifs comme étant des outils incontournables pour mener à bien des transformations réussies dans les pratiques pédagogiques des praticiens. Or, les recherches sur le développement professionnel des enseignants tendent à démontrer le succès des dispositifs imbriqués à même la tâche, laissant le libre choix concernant le type de projet à mener (Cochran-Smith & Lytle, 1999; Seidel-Horn, 2005) et qui visent à enrichir le répertoire de pratiques chez les enseignants (Andrews & Lewis, 2004, 2002). Pour perfectionner leurs compétences, les enseignants en exercice peuvent retirer maints bénéfices en s'engageant dans une communauté d'apprentissage. Cette dernière ferait partie de cette catégorie de dispositifs collectifs et flexibles, qui peut assister le praticien à ajuster ou à ajouter de nouvelles pratiques à son répertoire pédagogique (Louis & Marks, 1998). Avec les systèmes éducatifs qui veulent s'améliorer, les réformes qui demandent de plus en plus que soit mis en place des dispositifs de développement professionnel, le regard se tourne vers les communautés d'apprentissage et les communautés de pratique. Ces communautés constituent des lieux parfois libres ou prescrits, formels ou informels, où les intentions de connaître et de reconnaître sont partagés, et où le but est de construire des connaissances sur la pratique. Le présent numéro thématique veut justement présenter une diversité de dispositifs pouvant mener à un perfectionnement des professionnels de l'enseignement. Des chercheurs provenant des quatre régions francophones internationales impliquées dans le réseau de Recherche en éducation et formation ont été sollicités pour contribuer à cet ouvrage, et cette diversité culturelle apporte une richesse aux perspectives émergentes.

Du point de vue de la recherche, les dispositifs, comme les communautés d'apprentissage ou les communautés de recherche, présentent des difficultés inhérentes à leur fonctionnement et à leur accompagnement, lesquelles, lorsque creusées, pourraient éclairer davantage leur dynamique. Au regard de ces difficultés, mentionnons celle de la position épistémologique du chercheur. Comment le chercheur se positionne-t-il par rapport à la communauté d'apprentissage ? Comme chercheur ? Comme formateur ? Les deux ? Comment jongle-t-il avec cette dualité des rôles ? Comment procéder prendre des données dans la communauté d'apprentissage tout en redonnant aux praticiens ? Le chercheur se retrouve au sein de la dynamique non comme un observateur extérieur, mais de l'intérieur, en étant à même de porter un regard critique. Ce regard imbriqué dans le contexte recèle, on l'aura compris, des difficultés inhérentes à l'objectivation de ce qui est observé. La personne-ressource – souvent il s'agit du chercheur lui-même qui accompagne ces groupes d'enseignants – est chargée de maintenir une saine distance par rapport au dispositif de formation et de recherche pour s'assurer une rigueur méthodologique. Dans ces groupes destinés au développement professionnel, recherche et formation se trouvent intimement mêlées et s'alimentent l'une et l'autre. Ces dispositifs ne sont toutefois pas des panacées et ne conviennent pas au style de tous les enseignants. Cet ouvrage, en particulier la partie un sur l'accompagnement des communautés avec les articles de Savoie-Zajc et Bednarz & Proulx, vise à apporter une meilleure définition du contour de ces communautés et à ajouter à une meilleure compréhension de leurs inter connexions, influences mutuelles, liens d'interdépendance et des tensions qui entrent en jeu.

Le développement professionnel qui s'opère à l'intérieur d'une communauté d'apprentissage en milieu scolaire serait susceptible d'aboutir à l'amélioration de la qualité de l'enseignement dispensé à l'école (Cochran-Smith & Lytle, 1999), et ainsi à accroître l'apprentissage des élèves. Le même processus pourrait être généré dans une communauté de pratique, une communauté de recherche, ou encore par un projet de collaboration ou un partenariat université-école initié par un chercheur universitaire (Savoie-Zajc & Bednarz, 2007). Qu'en est-il justement du processus de collaboration qui façonne une communauté d'apprentissage ? Quelles sont les modalités de fonctionnement et les caractéristiques de cette collaboration entre pairs ? Concernant les produits de la communauté, quel est le processus d'apprentissage versus les produits d'apprentissage ? La partie deux de cet ouvrage tentera d'apporter un éclairage sur les processus grâce à la contribution des articles de Tavignot & Buhot, ainsi que de Schneeberger.

Cet ouvrage collectif, aborde le développement professionnel collaboratif des enseignants dans une variété de contextes, que ce soit en pédagogie en général ou encore dans diverses didactiques scolaires, qu'il s'agisse des sciences ou des mathématiques. Il soulève la question du renouveau pédagogique lié au développement professionnel des enseignants, sous l'angle des dispositifs collaboratifs de recherche et de formation et de ce qu'ils procurent concrètement. Mieux rendre compte de la diversité de ces dispositifs de développement professionnel et en particulier des communautés d'apprentissage, voilà un des objectifs de ce numéro thématique. Afin de problématiser sur cette hétérogénéité, il est pertinent de s'attarder à montrer une diversité d'agencement dans ces dispositifs. Certains de ces dispositifs existent déjà depuis un certain temps, d'autres sont terminés, et d'aucuns désirent y faire état de l'avancement des travaux qui y sont réalisés. En fait, certains de ces dispositifs sont considérés comme faisant partie des structures institutionnelles, d'autres sont présents dans certains juridictions et pas dans d'autres. Certaines de ces structures sont supportées par un cadre virtuel, et dans ce contexte, trois articles présentent la particularité d'un travail collaboratif réalisé dans des communautés virtuelles, soit les textes de Daele, Sylla & De Vos, ainsi que Laferrière & Allaire qui occupent la partie trois du numéro thématique.

Les autres questions qui se posent à l'égard des communautés d'apprentissage se résument souvent à qu'est-ce qu'on y construit ? Qu'est-ce qu'on y apprend ? Quelles sont les retombées réelles pour les praticiens qui s'y engagent ? Dans la partie quatre, sept articles (Pillonel, Luisoni & Rouiller, Charlier, Dionne & Couture, Bailleul, Thémines & Bodergat, Defrance, Roditi et Wittorsky & Briquet-Duhazé) abordent la question du développement professionnel des enseignants, que ce soit au niveau de leur sentiment d'autoefficacité, de leur identité, de la construction des compétences, des retombées pour la formation initiale des maîtres, du partage des pratiques entre enseignants, du perfectionnement en mathématiques, etc. On verra que des enseignants provenant de diverses juridictions dans la Francophonie perçoivent ces dispositifs comme des lieux de partage, de défi intellectuel, des sources d'idées brillantes pour rehausser leur enseignement. La communauté d'apprentissage nourrirait chez certains enseignants leur quête de sens dans l'exercice de leur profession.

Les divers articles qui constituent ce numéro thématique amèneront les lecteurs à porter un regard critique et réflexif sur les modèles collaboratifs de formation continue ou initiale en émergence qui sont proposés, afin de tenter de répondre aux besoins spécifiques de leur contexte, et à ceux exprimés par les enseignants ou futurs enseignants à qui la formation se destine. La position épistémologique qui sous-tend cet ouvrage considère résolument l'enseignement comme un instrument de changement social, où les praticiens sont perçus comme des développeurs de savoirs (Cochran-Smith & Lytle, 1999 ; Hargreaves, 2003). Cette position repose essentiellement sur l'idée d'ouvrir les horizons éducatifs aux multiples opportunités que présente le travail en collaboration, pour que les professionnels de l'enseignement puissent y démontrer leur professionnalisme et leur leadership pédagogique dans le monde du savoir, et ainsi contribuer à l'évolution d'un système éducatif qui soit un levier de développement et d'épanouissement pour chaque élève.

Pour la Revue Education & Formation,
Bruno De Lièvre — Liliane Dionne — Christine Couture
Juin 2010

Pour accéder au menu des publications e-293, cliquez ici.

Retour haut de la page

 

 

Publié avec l'aide financière du Fonds de la Recherche Scientifique - FNRS
et avec l'appui de l'Administration générale de la Recherche scientifique. Service général du pilotage du système éducatif


Dernière mise à jour le 18 Janvier 2011.